Noël d’ailleurs
Préambule : les coutumes de Noël ne sont pas toutes les mêmes à travers le monde. Et si celles que je vais décrire ci-après sont semblables aux nôtres dans l’ensemble, il y a tant de détails qui diffèrent qu’il fallait que je développe afin d’en offrir un panorama assez complet. Ce texte est donc long (le plus long que j’ai jamais écrit à ce jour, presque 6 pages A4 informatisées).
Et j’en profite pour souhaiter un joyeux Noël et de bonnes fêtes de fin d’année aux lecteurs de Nuances de plume et aux fidèles de ce site 🎄✨️🎆
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Habit et bonnet rouges bordés de fourrure blanche, foisonnante barbe immaculée dévoilant un sourire enjoué sur un visage empreint de jovialité, la bedaine confortablement arrondie, de grosses bottes aux pieds, une hotte sur le dos et une clochette en main… je pense que vous voyez de qui il s’agit !
Eh oui, le Père-Noël, bien-sûr ! (Si vous avez deviné, vous venez de gagner le droit de manger une papillote… pour autant qu’il vous en reste !).
Le Père-Noël qui, aux États-Unis, est nommé Santa Claus. Le bonhomme est pourtant bien originaire d’Europe, où il était auparavant connu en tant que Saint Nicolas, avant d’être importé chez Uncle Sam (1) par les Hollandais sous le nom de Sinter Klaas (2) dans les années 1820. Son costume et sa physionomie s’étant ensuite progressivement transformés outre-Atlantique, c’est dans les années 1930 qu’il fut mondialement propulsé grâce à une campagne de pub pour une célébrissime boisson gazeuse de couleur marron et au goût de cola (ou de coca, comme vous préférez). Ainsi revint-il en notre vieille Europe sous les traits du Père-Noël, évinçant les anciennes figures chargées de distribuer des cadeaux aux enfants sages. N’entendant pas partager son monopole tout neuf, il prit sans vergogne la place de Bonhomme Hiver, de Bonhomme Janvier, même de son illustre ancêtre Saint-Nicolas (envoyant au passage le complice d’icelui, le redouté Père Fouettard, aux oubliettes), détrôna carrément les rois mages et alla jusqu’à se payer le luxe de voler la vedette au petit Jésus de qui Noël est quand-même l’anniversaire ! (3 - 4)
Si je vous parle de Santa Claus, c’est parce que récemment, une excellente amie m’a demandé comment se passe Noël aux États-Unis, si ça ressemble à ce qu’on en voit dans les films.
Et là... tilt !... l’idée d’écrire un récit sur “Christmas made in USA” (mais en français, je vous rassure...) m’a germé en tête.
Noël outre-Atlantique ? C’est une véritable institution. Et Uncle Sam ne fait pas dans la demi-mesure, comme vous allez vous en rendre compte ! C’est qu'il s’agit quand-même du troisième plus grand pays du monde en termes de superficie, et d’une nation qui se prend pour le phare de l’humanité, que diable ! (5)
Tout commence le soir de la fête Thanksgiving (6), célébrée le troisième jeudi de novembre. À partir de ce moment, et pendant un mois environ, les Américains se mettent en mode Noël (à titre d’exemple, depuis le 28 novembre, date de Thanksgiving cru 2024, tous les messages que je reçois d’amis aux États-Unis commencent ou se terminent systématiquement par la formule consacrée “Merry Christmas” (7))
Au terme de ce jour d’action de grâce donc, Santa Claus débarque triomphalement à New York, dans Manhattan, lors d’une spectaculaire parade mise en scène par les magasins Macy’s. (8) Pendant 3 heures, de grands chars supportant d’énormes ballons à l’effigie de personnalités et personnages célèbres défilent dans les rues, sur la musique de fanfares ponctuant le cortège, devant des millions de badauds assemblés sur le parcours, parfois dans un froid assez piquant (les températures pouvant descendre en-dessous de - 5°).
Santa Claus… Encore lui… eh oui, car il est la star de Noël, outre-Atlantique ! Ou plutôt Santa tout court… son nom étant à peu près systématiquement amputé de sa seconde moitié.
Après avoir fait son apparition à la parade de Thanksgiving, le bonhomme en rouge envahit l’espace visuel, se démultipliant de façon impressionnante, et on le voit à peu près partout !
Enfin… ce sont en fait des “petits boulots” mal payés, souvent assurés par des messieurs âgés ou des chômeurs en quête d’un peu d’argent pour vivre… Noël a aussi ses faces sombres (et Uncle Sam n’a pas toujours de quoi se glorifier).
Puis le lendemain, c’est le fameux “Black Friday” (le “vendredi noir”), une journée d’offres à prix cassés (c’est peu de le dire… jusqu’à 80 % de réduction !) dans tous les commerces du pays, et sur Internet depuis l’essor de la vente en ligne. Les Américains se ruent dans les magasins ou passent des heures devant leurs écrans pour faire des achats, éventuellement de cadeaux et décorations de Noël.
La décoration, justement, parlons-en… Plus il y en a, mieux c’est !
Commençons par le sapin, véritable emblème des fêtes de fin d’année. Ou plutôt les sapins, car dans les foyers américains, on ne se contente pas d’un seul arbre de Noël dans le salon ou au séjour. Non, il y en a plusieurs dans le logis, et pas des tout petits… plutôt du genre 1,50 à 2,50 mètres de hauteur. Tous sont ornés d’une multitude de guirlandes brillantes, de gros nœuds de satin bouffants, de boules et autres suspensions, d’effigie de sucres d’orge rayés en rouge et blanc, de guirlandes électriques clignotantes, et surmontés d’un ange ou d’une étoile.
À propos d’arbre de Noël, il y en a un qui est célèbre à travers tout le pays, c'est le sapin du Rockefeller Center, à New York (ville qui est finalement un peu le point central des festivités fédérales…). Un épicéa de 23 à 25 mètres de haut, décoré de plus de 50.000 leds avec un câblage électrique de plus de 8 km de long, surmonté d’une étoile sommitale de 2,9 mètres et pesant 250 kg. Bref… c’est du grand, c’est du lourd ! Son illumination, début décembre, donne lieu à un grand show avec concert et dîner de gala. La cérémonie de mise en lumière est même retransmise à la télévision et regardée par des millions d’Américains ! Une patinoire est installée au pied du sapin, où, jusqu’à Noēl, petits et grands, qu’ils soient novices ou plus à l’aise, peuvent s’offrir quelques tours de glisse (et sûrement quelques gadins, aussi !) en patins.
Petite anecdote en passant… en 2020, lors de la livraison de l’arbre à New York, une chouette du nord adulte a été découverte dans les branches. Encore vivante, mais affamée et déshydratée, elle a aussitôt été emmenée dans un centre spécialisé où elle a été soignée avant d’être relâchée.
Question décoration (revenons-y), l’intérieur du logement n’est pas en reste, et il y a trois incontournables en la matière…
D’abord la chaussette de Noël, que Santa est censé venir remplir de friandises et de petites surprises. Il y en a une par habitant (adultes compris), elles sont accrochées au linteau de la cheminée s’il y en a une, sinon suspendues aux branches du sapin ou déposées à son pied.
Ensuite la couronne, grand diamètre de préférence, faite de branches de sapin, embellie de divers ornements et rubans brillants, et placée sur la porte d’entrée.
Enfin “the elf on the shelf”, littéralement “le lutin sur l’étagère”. Il fait un peu office de Père Fouettard (qui n’a finalement pas tant disparu que ça… il a juste beaucoup changé !). Selon la légende, il est l’envoyé de Santa dans chaque foyer pour surveiller les enfants afin de voir s’ils sont sages et s’ils méritent leur cadeaux. La journée, il observe stoïquement, immobile, mais la nuit il prend vie et doit faire un compte-rendu circonstancié au Père-Noël. Cependant, au moindre manquement à son devoir, il est immédiatement et irrémédiablement transformé en figurine de feutre. Et les enfants ne doivent en aucun cas toucher au lutin, sous peine qu’il perde son pouvoir magique et soit à jamais statufié, donc incapable d’accomplir la tâche que Santa lui a confiée… or si pas de compte-rendu favorable, pas de cadeaux !
Pour les chanceux vivant dans une maison avec jardin, la profusion décorative déborde à l’extérieur. Dans de nombreux quartiers ou villes, il y a le concours de la maison la mieux décorée (c’est très tendance, outre-Atlantique, vu que ça a aussi lieu pour Halloween). Et en ce domaine, “mieux” signifie bien souvent “plus”... fausse neige sur le toit et au sol s’il n’y en a pas de vraie, un haut sapin décoré (encore un !), des guirlandes clignotantes partout, Santa avec son traîneau et ses rennes, des gigantesques bonhommes de (fausse) neige, de grosses étoiles, des flocons et des cadeaux géants, des ours blancs… et j’en passe. Le tout lumineux, pour être bien visible la nuit. Faut que ça flashe, faut que les voisins en prennent plein les yeux ! (Quant à la facture d’électricité et à l’impact sur l’environnement… non mais vous croyez vraiment que c’est le moment d’y penser ?!)
Noël version USA ne se conçoit pas sans musique ni ritournelles de circonstance. Après les fanfares de la parade du soir de Thanksgiving, pendant tout l’Avent résonnent les traditionnels “Jingle bells” et “Silent night” par exemple, ou des chansons plus récentes telles que “White Christmas”, “Last Christmas” et “All I want for Christmas is you”. (9) Des petits groupes d’enfants vont parfois sonner chez les gens pour leur chanter quelques airs afin de récolter un peu d’argent pour des associations caritatives.
Puis au terme de plus ou moins un mois (tout dépend de la date du jour d’action de grâce), arrive enfin “Christmas Eve” (l’équivalent de notre réveillon du 24 décembre), ou “Christmas Day”, certains Américains préférant célébrer Noël le jour J.
Quoi qu’il en soit, c’est généralement en famille que ça se passe, à laquelle peuvent éventuellement s’ajouter des amis, voire des voisins, esseulés.
Repas, distribution des cadeaux, tout le monde se régale et s’extasie.
Côté menu de fête, si les Américains ne sont pas aussi gastronomes que les Français, ils ne rechignent pas sur les bonnes choses, et la table est bien garnie…
En guise de "mise en bouche" (formule policée par désigner les amuse-gueule...), des "pigs in a blanket" (ce qui signifie "des cochons dans une couverture"... lol !) faits de mini-saucisses enroulées dans de la pâte feuilletée et dorées au four.
En viande, la dinde rôtie accompagnée de sauce aux canneberges, ou le jambon de Noël, à moins que ce ne soient des “prime ribs” (des côtes de bœuf).
En accompagnement, la “green bean casserole” (10) qui est un plat de haricots verts à la crème de champignons, de la purée de patate douce et des oignons frits (en rondelles).
En dessert, des tartes… au potiron, aux noix de pécan ou aux pommes. Il y a aussi des “mince pies” qui sont des sablés aux fruits secs, et les indétrônables cookies.
Pour ce qui est de la boisson, les adultes apprécient le vin, et les enfants plébiscitent les sodas de toute sorte… pourvu qu’ils soient bien sucrés ! En revanche, notre sacro-saint apéritif n’est pas une coutume chez Uncle Sam.
Après le repas du réveillon ou l’après-midi de Noël, il est habituel de servir du “eggnog” (qui est ce que nous appelons du “lait de poule”), préparé à base de lait, de crème, de jaune d’œuf, de sucre, avec de la noix de muscade et de la cannelle, le tout aromatisé au rhum ou au whisky pour les adultes. Ou alors du chocolat chaud. Tout en proposant des “Christmas nuts”, un mélange de noix de pécan, de cajou et d'amandes enrobées d’une couche de sucre auquel se mêlent de la cannelle et des épices. Quant aux enfants, ils raffolent des “candy canes” qui sont des sucres d’orge avec une extrémité recourbée.
Côté cadeaux, les Américains sont facilement généreux. La moyenne de dépense pour 2022 s’établissait aux environs de 650 $ par citoyen, avec une somme médiane à peu près de 275 $ pour chaque enfant. Après, la différence entre les plus pauvres et les plus riches étant colossale aux États-Unis, si certains ne peuvent rien acheter parce que leurs revenus sont vraiment trop faibles, d’autres y mettent des sommes folles en offrant des articles de luxe.
Pour ce qui est de la nature des présents, les objets et gadgets technologiques ont la cote, de même que les vêtements (jusqu’aux chaussettes) de préférence personnalisés, pour les adultes comme pour les bambins. Sont également prisés les accessoires de mode et de bien-être, les parfums et cosmétiques, les bijoux, la maroquinerie et les cartes cadeaux. Et pour les enfants, les jouets, bien évidemment, surtout s’ils sont à l’effigie de personnages et héros de films pour la jeunesse !
Après ces agapes et ces profusions de cadeaux, Noël se termine plus calmement. Pendant l’après-midi ou la soirée du 25 décembre, que les Américains finissent de digérer leur festin de midi ou qu’ils peinent encore à se réveiller complètement pour ceux qui ont réveillonné la veille, ils regardent des vidéos qui parlent de… Noël, bien-sûr !... tels que le sempiternel “Maman j’ai raté l’avion”, ou “Le grinch” ou encore “L’étrange Noël de Monsieur Jack”. (11)
Noël conserve cependant une dimension religieuse importante pour beaucoup d’Américains, dont environ 70% se disent chrétiens, avec une majorité de protestants (48%, contre 22% de catholiques, 25% sans religion, et 5% d’adeptes d'autres religions). De nombreuses églises organisent des services aux chandelles le 24 décembre au soir, et près de la moitié des chrétiens déclarent se rendre à un office religieux à cette occasion.
Voilà, ma chère amie, comment se passe Noël chez Uncle Sam !
(Décembre 2024) 🎄🎅
Texte inspiré par une question de Lys-Cléa, qui m’a récemment demandé comment se passait Noël aux États-Unis, si cela ressemblait à ce qui en est montré dans les films.
Merci infiniment à elle de m’avoir offert ce thème, alors que je me demandais bien ce que j’allais pouvoir publier pour Noël 🙏✨️
Je tiens aussi à remercier vivement DCB, qui, ayant des origines d’outre-Atlantique, m’a apporté une aide précieuse en partageant avec moi des éléments de sa culture américaine et en me fournissant indications, exemples et anecdotes 🙏💫
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Notes :
1- Oncle Sam (Uncle Sam) en anglais, est un personnage fictif représentant de manière allégorique le gouvernement américain. Apparu dans les années 1800, il s’agit d’un homme blanc d’âge avancé, à la barbe et aux cheveux blancs, vêtu d’un pantalon rayé rouge et blanc, d’une veste bleue (parfois avec des étoiles blanches), d’un nœud papillon rouge, et coiffé d’un haut-de-forme aux couleurs du drapeau national. Bref, le parfait emblème des États-Unis !
2- Sinter Klaas qui, par analogie, donna son nom, Santa Claus, au Père-Noël américain.
3- Selon les différentes régions des pays d’Euope, les cadeaux étaient distribués aux enfants sages par le petit Jésus lui-même dans la nuit du 24 au 25 décembre (date reprise pour le passage du Père-Noël), par Bonhomme Hiver ou Bonhomme Janvier le 1er janvier, ou par les rois mages pour l’Épiphanie le 6 janvier. Quant à Saint-Nicolas, il le devançait tous en passant le 6 décembre, accompagné du redouté Père Fouettard. Si les enfants avaient été sages, ils recevaient des friandises et menus cadeaux du saint. Sinon, c’était une correction administrée par son acolyte !
4- Lors de la fête de Noël, le 25 décembre, les chrétiens célèbrent la naissance de Jésus, fils de Dieu et né de la Vierge Marie. On peut donc considérer cette date comme son “anniversaire”.
5- Les États-Unis, en termes de superficie, sont devancés par la Russie en premier et le Canada en second.
6- Le mots Thanksgiving vient de “to give thanks”, ce qui signifie “rendre grâce”. Ce jour-là, les Américains commémorent la première récolte obtenue par des pèlerins anglais arrivés en 1620 sur leur terre d’accueil (avec l’aide d’une tribu amérindienne).
7- Merry Christmas, parfois abrégé en “merry Xmas”, signifie tout simplement “joyeux Noël” dans les pays anglophones.
8- Macy’s est une chaîne de grands magasins basée à New York et implantée dans plusieurs villes des États-Unis. Quant à la première parade de Thanksgiving, elle eut lieu en 1924.
9- “White Christmas” est une chanson datant de 1942, écrite par Irving Berlin et interprétée à l’origine par Bing Crosby. Depuis, elle a été reprise par de très nombreux artistes, et son succès outre-Atlantique ne se dément pas.
“Last Christmas” est un titre du groupe Wham, écrit par son chanteur George Michael et enregistré en 1984.
“All I want for Christmas is you” est un tube de la chanteuse américaine Mariah Carey, initialement publié le 1er novembre 1994, puis ayant fait l’objet de plusieurs versions. C’est à ce jour encore la chanson de Noël la plus écoutée et vendue.
10- En anglais dans le texte ! À la différence que “casserole”, en anglais, désigne une cocotte quand on parle du récipient et un ragoût quand on parle du plat cuisiné.
11- “Maman, j’ai raté l’avion” (“Home alone” de son titre original), sorti en 1990, est un film de Chris Columbus avec Macaulay Culkin dans le rôle principal.
“Le Grinch” (“The Grinch”), sorti en 2000, a été réalisé par Ron Howard avec Jim Carrey dans le rôle-titre. Une version animation a été faite en 2018 par Yarrow Cheney et Scott Mosier.
“L’étrange Noël de Monsieur Jack” (“The nightmare before Christmas” pour les Américains), sorti en 1993, est un film d’animation de Tim Burton.
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